Le progrès véritable, c'est la sagesse d'y renoncer
Que feriez-vous si vous pouviez permettre aux hommes d’accroître la connaissance de leur passé et la qualité de leur vie quotidienne, en sachant que vous risqueriez de causer leur perte ?
Dzud est un livre étrange. Il nous raconte la quête d’Oleg, jeune berger des steppes, dans un monde imaginaire étrange, où les livres sont des objets maléfiques et dangereux.
Pas de genre, pas de morale, pas de sujet précisément défini… Romain Jaillant nous propose une histoire atypique mais qui résonne étrangement avec des questionnements et des craintes très actuels.
Nous lui avons posé quelques questions pour vous présenter ce drôle de premier roman.
Romain Jaillant, qui êtes-vous ?
Je suis médecin ophtalmologiste. L’ophtalmologie, c’est ma vie : mes patients, la chirurgie. L’écriture c’est une gourmandise. Une bouffée d’air pour retrouver du rêve dans un quotidien très concret.
Après une histoire des ophtalmologistes célèbres et la rédaction de portraits de médecins pour un magazine, vous écrivez Dzud. Racontez-nous…
L’écriture, comme la lecture d’ailleurs, est pour moi un moyen d’évasion. Au cours de l’internat, la rubrique consacrée à des médecins aux profils très variés que je tenais, et pour lesquels je me passionnais le temps de l’interview, m’apportait cet oxygène. Par la suite, ma thèse « Ophtalmo, mais pas que », consacrée à l’histoire ma discipline, a été l’occasion, en réunissant médecine, histoire et écriture, de transformer un travail universitaire dont je craignais l’austérité, en un réel plaisir. Dzud est venu plus tard. L’écriture de ce roman m’a permis de me replonger dans les souvenirs d’un voyage superbe à l’heure où les enfants apparaissaient dans ma vie et qu’un rythme plus ancré débutait…
C’est un roman atypique. Dans quel registre pourriez-vous classer Dzud ?
Effectivement, c’est un roman écrit spontanément et le résultat peut paraître surprenant. S’il fallait le classer, je dirais que Dzud a quelque chose des contes philosophiques, l’humour et le talent en moins. Nous ne sommes certes pas dans la satire, mais il y a tout de même cette idée de prendre un peu de recul sur nous-mêmes (je m’inclue bien évidemment dans cette introspection). J’ignore si l’exercice est réussi, il est si difficile ! mais il est amusant de réfléchir sur son temps, d’aspirer à le croquer selon un regard différent. Roman d’aventure, d’anticipation ou conte je ne sais pas. Dzud, c’est d’abord une histoire, celle d’un enfant des steppes ; un récit très court, comme une fable des temps modernes. Une lecture pour le dépaysement à qui aime l’ailleurs et aspire à la remise en question.
Vouliez-vous faire passer un message, ou simplement amener les lecteurs à se questionner ?
Dans cette fable, il y a bien sûr le voyage et les grands espaces, mais différents niveaux de lecture sont possibles. La modernité, nos modes de vie et l’environnement, sont en effet au cœur de la réflexion. Certaines pages évoqueront peut-être même à certains le confinement, d’autres le mouvement des gilets jaunes. En dépit de ce qu’enseigne habituellement l’art des fables, je n’ai pas souhaité faire apparaître de morale. Chacun fera son chemin. Je crois sincèrement que les changements nécessaires naîtront d’une prise de conscience, qui seule permettra l’adhérence à des valeurs nouvelles. Je les imagine plus mesurées, moins consuméristes mais aussi porteuses de bonheur.
Dzud – Romain Jaillant
Dans une contrée lointaine soumise aux caprices d’une nature rugueuse et difficile, Oleg, jeune nomade des steppes, doit accomplir son rituel de passage à l’âge adulte. Sa quête le mènera aux confins des savoirs de son peuple. La découverte d’objets fantastiques, les livres, le plongera dans un imaginaire luxuriant d’autant plus séduisant que les secrets qu’ils révèlent sont réputés maudits.
Romain Jaillant est ophtalmologiste à Paris. Il est l’auteur d’un ouvrage consacré à l’histoire de sa discipline et aux ophtalmologistes célèbres ainsi que de plusieurs portraits de médecins atypiques publiés dans le magazine « What’s Up Doc ? ».
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