Auteur prolifique d’ouvrage variés, Laurent Vignat publie son dernier roman, Avaler l’étincelle aux éditions de la Rémanence. rencontre avec cet auteur polymorphe !
Je ne crois pas en l’inspiration. Seule la ténacité fait avancer.
Laurent Vignat, qui êtes-vous ?
J’ai 54 ans. Je réside en Bourgogne, près de Chalon-sur-Saône, depuis plus de vingt ans après avoir vécu mon enfance et mon adolescence à Paris. J’enseigne le français en collège et l’expression et la communication à l’université de Bourgogne. J’anime aussi des ateliers d’écriture. J’écris depuis l’âge de 14 ans.
Vous avez publié des livres très variés. Pouvez-vous nous présenter votre travail d’auteur ?
Effectivement ma bibliographie est très diverse. J’ai commencé par publier des recueils de nouvelles, puis des romans. Depuis une dizaine d’années, j’explore d’autres genres tels que le conte, l’essai ou encore la biographie (j’ai publié une vie du poète Antonin Artaud).
Cette diversité témoigne, je pense, d’une curiosité instable, qui n’obéit à aucune stratégie préétablie.
Ce qui gouverne avant tout mon travail, c’est d’abord le plaisir d’écrire, autrement dit le plaisir absolu qu’il y a à trouver une phrase qui pourra m’étonner, qui saura cristalliser un désir, une idée, une sensation. Qui saura surtout donner au monde chaotique qui nous entoure une forme.
C’est une recherche exigeante, douloureuse, qui exige de la patience et de la ténacité. En ce sens, je ne crois pas en l’inspiration. Seule la ténacité fait avancer. J’aime beaucoup ce conseil que Georges Perec adresse dans une lettre à un ami confronté au « vertige » de la page blanche : « écrire tous les jours, génie ou pas. ».
Avaler l’étincelle est un drôle de roman, sauriez-vous le classifier ?
C’est une fantaisie, c’est un roman-fable. C’est aussi l’expérience d’une jeune femme d’aujourd’hui confrontée à un douloureux secret familial. C’est encore une réflexion sur notre rapport à la culture et la crise de la transmission de cette culture.
Comment avez-vous imaginé cette histoire, et à quel public la destinez-vous ?
L’histoire est partie d’une figure, celle de Beethoven, et surtout de sa Neuvième Symphonie, avec son fameux Ode à la Joie. Œuvre universelle, archétypale de la civilisation occidentale. Et je voulais que ce « monstre symphonique » se heurte à la vie d’une jeune femme issue d’un milieu populaire, Marlee. Comment mettre en contact ces deux réalités si éloignées ? C’est là que l’imagination a agi. J’ai donc imaginé que Beethoven, furieux de ce que les humains ont fait subir à sa Symphonie (il ne faut pas oublier que l’œuvre a été notamment récupérée par le régime nazi), décide de la récupérer définitivement. Pour ce faire, il faut d’abord que la Symphonie soit « avalée » par l’un des ces humains : ce sera Marlee.
Je souhaiterais que le livre atteigne le plus large public. Puisque la narration est assumée par Marlee, le style et les préoccupations de la narratrice peuvent séduire un public adolescent. Mais le livre pose également des questions sur la transmission, l’héritage culturel et, en ce sens, il peut susciter l’intérêt de tous. Enfin, par bribes, sont livrés des éléments biographiques sur Beethoven qui intéresseraient un public plus mélomane. Je précise que le roman est complété par une notule qui retrace à grands traits les différentes récupérations dont la Neuvième a été l’objet depuis sa création en 1824.
Quels sont vos autres projets d’écriture ?
En janvier paraîtra aux éditions du Jasmin un essai sur le poète Antonin Artaud. Et j’écris depuis plus de trois ans un roman où il sera question, entre autres, de la Ligne de démarcation qui a partagé la France de 1940 à 1942.
Avaler l’étincelle – Laurent Vignat
Certains avalent des chapeaux, d’autres des couleuvres, Marlee Creutzer, elle, avale une « Belle étincelle divine ». Rien ne prédisposait cette jeune fille de dix-sept ans, née de traviole dans une campagne pauvre, à devenir le calice d’une « Joie » qui a enchanté l’humanité entière. C’est son créateur, irascible, qui en a décidé ainsi car ce monde, désormais, ne mérite plus sa Symphonie.
Né en 1970, Laurent Vignat enseigne les Lettres en Bourgogne. Il anime également des ateliers d’écriture. Depuis plus de vingt ans, une heure par jour, il écrit : des nouvelles, des romans, des contes, des essais. Et cela lui fait du bien. Quand il n’écrit pas, il pédale ; il fait la classe ; il lit ; il essaie de comprendre le monde et parfois s’en effraie ; il passe la tondeuse ; il va à la rencontre des lecteurs ; il mesure en lui l’avancée du temps : cela l’apaise ; il se réjouit d’un mercurey rouge ; il se bricole des sérénités fragiles. Et il écoute Beethoven, tant qu’il est encore là.
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