Le palais des innocents

La mission numéro un, qui avait lieu dès l’identification de la victime, consistait à aller sonner à la porte de ses parents pour leur annoncer l’inacceptable et bousiller tout simplement leurs vies à jamais. Balèze, il fallait bien le reconnaître. Mais celle que devait assurer Allanberg n’était guère plus engageante. Là aussi, il s’agissait d’aller réveiller des parents en pleine nuit pour les informer d’une mauvaise nouvelle au sujet de leur gosse. Sauf que ce n’était pas la mort du gamin qu’il fallait annoncer. Ce qu’il fallait dire à ces deux personnes qui, encore quelques minutes auparavant, roupillaient joyeusement du sommeil de l’innocent (rêvant bien entendu chacun de leur côté d’allègres turpitudes avec un tout autre individu que leur conjoint), ce qu’il fallait communiquer à ce couple bien sous tout rapport qui prônait la pédagogie moderne, les jeux éducatifs et les magasins bio, ce qu’il fallait annoncer à ces parents en adoration devant le fruit de leur ancien amour, c’était que leur progéniture chérie, leur trésor adoré, leur cher et vénéré gamin venait tout bonnement d’assassiner un autre enfant de la façon la plus barbare qui soit.